Femme au Fone à la rencontre de Woman, un film documentaire raconté par les femmes

Woman, tournage en RDC

13-07-2018 09:32:04

Interviewer et échanger avec quelques femmes de la République Démocratique du Congo sur leur vie, leur combat, leur engagement, leur solidarité c'est l'objectif d'une mission de tournage effectuée au Nord Kivu et Sud Kivu par la Co réalisatrice du film documentaire "Woman", madame Anastasia Mikova ,au mois de juin 2018.

Selon Anastasia Mikova "Woman" est un film qui donne la parole aux femmes du monde entier pour mesurer le chemin qu'elles ont parcouru , car dans la vie d'une femme il y a une histoire.

«Nous voulons donner la parole à 3000 femmes du monde entier car les femmes ont une force intérieure que beaucoup de gens ne considèrent pas, elles ont la volonté et la capacité à changer les difficultés auxquelles elles sont confrontées ou auxquelles elles assistent mais de fois elles ne sont pas consultées, nous voulons dans ce film mettre en lumière les injustices subies par les femmes aux quatre coins de la planète» explique la co réalisatrice de Woman à une journaliste de Femme au Fone.

Au Sud Kivu et Nord Kivu, une journaliste de la rédaction Femme au Fone a accompagné l'équipe dans ce tournage où plus de 35 femmes ont accepté de témoigner concernant des sujets tels que l'enfance, l'éducation, l'adolescence, le mariage, le travail, les discriminations, les violences etc.

«Les femmes congolaises sont fortes, elles sont extraordinaires, elles ont un sourire et une énergie formidable malgré les peines. Je pense que c'est important à travers ce documentaire que la face du monde soit informé sur les violences que subissent certaines femmes dans les villages et même dans les villes de ce pays. Je suis contente de voir que malgré le calvaire vécu par certaines , elles sont débout et sont actrices de changement dans leurs communautés» souligne Anastasia Mikova.

Quelques témoignages des femmes dans Woman

FAIDA M, 28 ans

«Je suis la fille unique et cadette de ma famille, je viens après mon grand frère qui me dépasse de deux ans. J'ai passé mon enfance dans une famille pauvre au village Pinga situé au Nord Kivu. J'ai eu le privilège de porter les souliers pour la première fois de ma vie quand j'avais 10 ans. Ma mère est morte au moment où j'avais 4 mois, mon père me l'avais cacher . Il me trompait chaque jour que ma mère partait très tôt aux champs et qu'elle revenait tard dans la nuit quand je dormais. Pour que je ne pose pas trop des questions, mon père me donnait de l'alcool chaque jour surtout le soir pour que je m'endort et que je me réveille en retard.

Mon père était alcoolique , il ne m'a pas fait étudier, j'ai insisté pour que j'aille à l'école mais mon père ne voulais pas. J'ai grandi sans éducation et je dormais par terre car je n'avais pas de matelas ni de lit.

UN jour alors que je n'avais que 12 ans , mon père a envoyé son petit frère aller chercher à manger dans un autre village, ce jour là il est arrivé à la maison ivre, très colérique , il avait refusé de manger et s'est jeté moi et m'a violée. J'ai perdue connaissance, mon père a pris fuite car il me croyait morte.

une vielle dame, voisine est venue et m'a aidé à me réveiller et m'a dit de ne jamais raconter cela à qui que ce soit, car c'est de l'inceste, ca ne se raconte pas. Mon père est revenu deux ans plus tard là où il était parti, il m'a encore violée. J'avais 14 ans et quelques mois après je me suis retrouvée enceinte».

RUKUMBANYI B. 23 ans

J'ai grandi dans une famille où mon père ne faisait que battre sa mère tout le temps. je me rappelle un jour, mon père a frappé ma mère et elle est tombé évanouie. Mon enfance reste marqué par les violences domestiques que mon père faisait subir à ma mère. A 12 ans ma mère est morte, mon père a épouse une autre femme qui nous faisait souffrir moi et mes frères. J'ai commencé à me prostituer pour trouver de quoi manger et pour nourrir mes petits frères. Je suis tombée enceinte en 2007 alors que j'étais encore trop jeune. Celui qui m'a engrossé a refusé ma grossesse, et puis je fais porter la grossesse à un autre homme qui a accepté de m'épouser, j'ai commencé à cohabiter avec lui. Après 1 année de vie commune, alors que je vendais la braise, je suis parti chercher la marchandise dans la brosse, j'ai été enlevée et violé par des rebelles dans la forêt. J'y ai passé deux mois. En revenant chez moi, j'ai été rejetée par mon mari qui m'a dit qu'il ne peut plus vivre avec moi. J'ai été rejetée par toute ma belle famille et même mon père et mes oncles. C'est aujourd'hui que j'apprends à m'aimer grâce à la formation reçue à la cité de la joie de Vday, même si j'ai été violée je vais me battre pour ma vie future.

BORA N.D 20 ans

«J'habite à Uvira dans l'un des territoires du Sud KIvu, mon père lui faisait étudier seulement mon frère et me disait que ce n'est pas très important de faire scolariser une jeune fille. Ma mère elle; a pris la responsabilité de me faire étudier jusqu'en sixième secondaire. J'ai obtenu mon diplôme d'Etat.

J'ai connue une adolescente turbulente car je n'écoutais pas les conseils de mes parents. Un jour mon père m'a brutalisé car il avait trouvé une lettre d'amour rédigée par un garçon alors que je n'avais que 15 ans. Mon père m'a tapé, il est même parti annoncer cela à mes collègues de classe.

Je suis partie en vacances chez mon oncle paternel à Kalemie, les Mai Mai sont venu brulés la maison de mon oncle en y enfermant les parents lors d'une attaque. Arrivé chez nous, mon père a demandé comment est ce que j'ai réussie à m'en sortir de cette attaque de Mai Mai. Mon père ne m'a pas cru que je me suis enfuie, il a dit que c'est comme si j'ai été violée par ces inciviques mais je ne veux pas le dire. Il commençait à m'humilier et raconter à tout le monde dans mon quartier que j'ai été violée. J'aurai souhaité naitre garçon, car si j'étais un garçon, je serais pris en considération par mon père et ma famille. A ce jour j'aide les femmes de mon quartier à dénoncer les violences qu'elles subissent, car une femme mérite mieux qu'être humiliée».

Woman est un documentaire co réalisé par Anastasia Mikova et Yann Arthus-Bertrand, ce film se veut être la suite du documentaire Human, consacré aux hommes et aux femmes de la planète.

Au cours de ce tournage, la co réalisatrice a été accompagné par Benjamin Vershinin qui s'assurait de la qualité sonore et la beauté de l'image des interviewées ainsi que de Lolita Chamaillard assistante de réalisation.

Par Eliane POLEPOLE